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Frédéric Gal, Directeur du projet de modernisation des projets

Pour vous, quelles sont les principales évolutions à venir dans votre secteur d’activité ?

Aujourd’hui, nous sommes à un tournant majeur pour l’industrie de la construction. En effet la prise en compte de la contrainte carbone dans notre activité s’affirme chaque jour davantage. Elle concerne la réduction de nos émissions pour lutter contre le changement climatique mais aussi la volonté de diminuer l’utilisation des énergies fossiles afin de réduire notre dépendance. Chez Bouygues Construction, nous nous engageons à réduire nos émissions de 40% à l’horizon 2040. Par ailleurs, les hausses du prix de l’énergie que nous anticipons depuis une dizaine d’années arrivent plus vite que prévu en raison des récents évènements. Il est alors plus que jamais indispensable d’améliorer la productivité en matière de réalisation d’ouvrages éco-responsables, tout en garantissant bien sûr la sécurité et la santé des collaborateurs. Sur notre feuille de route figure l’ambition de construire des ouvrages durables, et de diminuer les émissions de gaz à effet de serre nécessaires à leur réalisation. Cela passe l’optimisation des types de matériaux utilisés, la réduction de leur quantité, l’industrialisation de leur mise en œuvre sur site et de leur exploitation.
Nous avons donc actuellement deux objectifs majeurs : réaliser tous nos projets en bas carbone, et ce, grâce à l’industrialisation du secteur de la construction. Pour y parvenir, nous développons des approches collaboratives et efficaces, par le biais du digital. Le processus BIM, une approche innovante pour toute le cycle de vie du bâtiment, est l’un des meilleurs outils à notre disposition, et nous avons à cœur de le rendre accessible au plus grand nombre.

Quelle est votre vision à long terme du numérique / BIM dans votre activité ?

Dans un contexte où le secteur de la construction est l’un des seuls qui n’a pas fait sa transformation digitale*, favoriser l’adoption des outils numériques au service de la productivité et de la performance environnementale est un défi. Et le BIM, bien que puissant, n’a pas encore été exploité au maximum de ses capacités. Pour y remédier, nous avons étendu son utilisation à toutes les phases des projets : de la programmation à la maintenance en passant par la conception, la construction, la rénovation et l’exploitation. Désormais, toutes les équipes l’utilisent sur les chantiers. Et en faisant remonter les besoins du terrain vers nos bureaux d’études grâce à une approche « bottom up » on favorise largement son adoption. C’est grâce à cette approche pragmatique, participative, qui engage tous les collaborateurs que l’on pourra emmener le secteur de la construction vers sa nécessaire transformation digitale. On observe d’ailleurs déjà les résultats de cette méthode, à savoir des réductions de temps de réalisation d’ouvrages allant de 10% à 40%.

Comment le numérique/ le BIM transforme concrètement l’ensemble de la filière construction ?

Les outils digitaux, à l’instar du BIM, permettent d’améliorer la productivité, la sécurité, et l’atteinte de nos objectifs bas carbone. Loin de se réduire à une maquette 3D d’un ouvrage, ce processus fournit un ensemble de données sur tous les aspects et les phases d’édification d’un bâtiment. Les représentions géométriques, les propriétés des éléments de construction, ou encore leurs caractéristiques physiques et thermiques, tout est centralisé et rendu disponible à la totalité des acteurs de la chaine de valeur. L’automatisation de nombreux processus permet en outre aux collaborateurs de se concentrer sur des taches à valeur ajoutée. L’outil permet aussi de réaliser un jumeau numérique, c’est à dire une représentation en temps réel de l’ouvrage, afin d’améliorer les phases de construction et d’exploitation. Et dans quelques années, on pourra même utiliser l’intelligence artificielle pour booster tous ces processus.

En matière de bas carbone, le processus BIM permet de calculer très précisément le bilan carbone des projets en phase de conception, de construction et d’exploitation et de les optimiser. Bouygues Construction maitrise très bien ce sujet, et a mené avec succès de grands projets globaux avec engagement de performance énergétique. En témoignent le ministère de la défense à Balard, cet ensemble immobilier regroupant des états-majors des Forces armées françaises, le tribunal judiciaire de Paris, ou encore la Seine Musicale à Boulogne-Billancourt. Et pour la rénovation énergétique, nous avons aussi développé notre expertise pour transformer les ouvrages en bâtiments à énergie positive, c’est-à-dire qu’ils produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment. C’est le cas aujourd’hui de notre siège social à Guyancourt.

*Etude McKinsey : The construction productivity imperative